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Entreprises : entre intellect et émotion, miser sur l’humain

La reconnaissance des moteurs de chacun dans l’entreprise est un gage de bien-être et d’engagement pour le salarié. C’est aussi un changement d’état dans l’action au quotidien des managers : leur accompagnement est primordial.

J’aime particulièrement cette citation d’Albert Einstein car elle résume bien l’évolution de notre compréhension cérébrale :

« Le mental intuitif est un don sacré et le mental rationnel est un serviteur fidèle. Nous avons créé une société qui honore le serviteur et a oublié le don ».

Nous sommes au pays de Descartes et le rationnel a pris une place considérable dans nos existences. Aujourd’hui, grâce au développement de l’imagerie médicale, nous savons que nous avons différents niveaux de connaissance : l’esprit rationnel, siège de la compréhension, de la logique, de l’analytique, et l’esprit émotionnel, siège de l’intuition, de l’émotionnel, du sensitif, qui est plus impulsif et peut paraître illogique.

Quand ces deux modes de connaissance s’associent, nous exploitons pleinement notre potentiel et la vie est fluide. Lorsque ce n’est pas le cas, nous sommes souvent désorientés par nos réactions. Nos émotions prennent les commandes et nos comportements peuvent nous surprendre. Nos actions ne sont plus en harmonie avec nous-même et notre environnement.

Au quotidien, nous ne prenons pas le temps de nous écouter pour bien comprendre le besoin que nous masque l’émotion. Nous essayons de la contrôler et nous n’acceptons pas le message qu’elle nous livre. Une dysharmonie entre l’esprit rationnel et l’esprit émotionnel s’installe, provoquant inconfort et situations difficiles à affronter.

Nos émotions sont notre boussole : elles nous éveillent à la conscience de soi et à l’importance de l’harmonie et de l’interaction de ces deux esprits, sièges de notre potentiel humain.

Et l’entreprise dans tout ça ?

Si l’importance de l’humain est aujourd’hui largement reconnue dans les enjeux stratégiques, si de nombreux dispositifs de formation sont mis en œuvre, les entreprises restent malgré tout démunies pour faire croître le capital humain. .

La course effrénée aux résultats financiers imprime un rythme qui ne permet pas aux salariés de prendre soin et conscience d’eux, pour explorer et exploiter leur potentiel dans le cadre de leur mission au sein de l’entreprise.

Dans un environnement de non-reconnaissance et de manque d’autonomie, le désengagement progresse. Il est primordial de comprendre le fonctionnement humain et d’accompagner les managers afin que chaque personne soit reconnue dans son individualité. Pour créer une intelligence collective de l’organisation, chacun doit être conscient de ses moteurs personnels dans l’exercice de sa fonction, afin de pourvoir ensuite se relier aux autres membres de l’organisation.

Comment introduire ce nouvel état d’esprit au sein de l’entreprise afin de favoriser le développement du capital humain ?

L’entreprise aujourd’hui ne peut penser uniquement financier et économique : il faut aussi penser « humain ». L’innovation managériale est le moteur de cette dynamique en favorisant une réflexion systémique.

D’autres éléments viennent bousculer l’entreprise et son mode de fonctionnement actuel : le développement croissant du numérique et les attentes d’une culture intergénérationnelle et interculturelle.

Le numérique est un moyen au service de la simplification de l’organisation, qui redonne un espace de créativité, de liberté et d’autonomie à l’humain et non vu comme une finalité.

A l’horizon 2020, les générations du baby-boom auront quitté le monde de l’entreprise. D’autres générations l’occuperont, avec des aspirations différentes :

  • Les « X », nés entre 1966 et 1976, ont besoin de sécurité. Le travail est pour eux une unité de temps et de lieu supposant des responsabilités et des devoirs. Ils tiennent à une stricte séparation entre vie professionnelle et privée.
  • Les « Y » ne croient pas à la sécurité de l’emploi et s’inscrivent davantage dans une quête de liberté et de sens.
  • Enfin, les « Z », nés à l’ère du numérique, ont besoin de sens avant tout et sont très attachées au partage, à l’échange et à l’esprit de coopération.

L’innovation managériale est au cœur de ce changement d’état d’esprit : le rôle du manager doit être repensé. Il va s’orienter vers le développement du capital humain, pour permettre à chacun d’exprimer ses moteurs personnels et organisationnels dans l’action au quotidien. Ainsi, chaque salarié retrouvera sa liberté, son autonomie et son engagement à la création de valeur dans l’entreprise.

Les 4 clés indispensables au manager pour permettre à chacun de développer son capital et son envie au cœur de sa mission :

  • Donner le sens et la vision et les partager
  • Créer le sentiment d’être utile
  • Permettre à chacun d’explorer et d’exploiter son potentiel
  • Aider le salarié à se sentir reconnu
  • Le manager crée l’espace de ressources nécessaires à l’harmonie entre l’intellect et les émotions afin que chacun puisse explorer et exploiter son potentiel.

    C’est un gage de bien-être du salarié, et différentes études ont démontré que le bien-être est le facteur-clé de la performance.

    Après avoir longuement favorisé l’engagement individuel, il est important de mailler ces différents potentiels pour créer un esprit d’équipe qui dynamisera l’organisation et concrétisera une performance pérenne.

    Néanmoins, ce changement d’esprit d’état n’est pas aisé pour un manager. Il introduit dans sa mission deux modes de fonctionnement qu’il ne maîtrise pas : la pensée systémique et l’art de la communication avec la maïeutique.

    Pour aider les managers à mieux se connaître et à mieux se comprendre, pour construire leur identité managériale en fonction de leurs moteurs personnels, il est important de créer un espace de ressources afin qu’ils puissent expérimenter, d’abord sur eux-mêmes, ce qu’ils auront à appliquer ensuite aux les membres de leurs équipes. De cette boucle réflexive naîtra une boucle de coopération.

    Aujourd’hui, les outils de la psychologie positive nous permettent d’accompagner les managers vers ce devenir, basé sur le développement du capital humain, pour créer l’harmonie entre l’intellect et les émotions afin que chacun puisse explorer et exploiter ses moteurs personnels et organisationnels et construire son engagement. En somme, devenir acteur dans l’entreprise.

    Pour ma part, l’intégration des outils de la psychologie positive dans les séances de coaching collectif est d’une grande utilité pour accroître la compréhension des schémas mentaux et développer la flexibilité mentale, afin de mieux se connaître et se comprendre, pour mieux interagir avec les autres.

    J’utilise le programme SPARC (acronyme pour Situation, Perception, Automatisme, Réaction, Connaissance), élaboré par les psychologues LLona Boniwell et Lucy Ryan. Son utilisation très ludique permet à la personne de prendre conscience de ses schémas mentaux pour pouvoir changer les automatismes acquis.

    Les concepts de la psychologie positive au travail sont mis en œuvre.

    Ainsi, l’harmonie des différents niveaux de connaissance sont explorés et exploités dans la reconnaissance et l’autonomie de chacun. Le potentiel humain dans les équipes et les organisations est libéré et l’entreprise peut ainsi relier l’économique et l’humain. Cela n’a rien d’antinomique, mais est au contraire porteur de richesse future !

    Marie Christine Villagordo